Enseignants Editions flammarion

« Il faut se raidir et emmerder l'humanité qui nous emmerde ! […] Dans quinze ans d'ici, j'entreprendrai un grand roman moderne où j'en passerai en revue ! Je crois que Gil Blas peut être refait » : cette lettre de Flaubert à Louise Collet suggère l'impact du roman de Lesage plus d'un siècle après sa parution. Avec Gil Blas (1715-1724), les mémoires imaginaires d'un anti-héros, Lesage invente un type de fiction inédit, nourri de son expérience de traducteur, de dramaturge et de romancier. Tenu tour à tour pour un montage d'originaux espagnols, pour un roman picaresque à la française et pour un roman d'aventures réaliste, le Gil Blas fut plagié, imité, et surtout salué comme l'un des plus grands romans français : « Gil Blas est notre Don Quichotte », disait Nodier.

Gil Blas, fils d'un écuyer et d'une duègne, quitte à dix-sept ans le foyer familial pour se rendre, à dos de mule, à l'université de Salamanque, où il s'apprête à étudier. Mais une série d'imprévus rendront ce projet impossible : volé par un muletier, embrigadé par une troupe de brigands de grand chemin, emprisonné injustement, il deviendra à Valladolid le serviteur d'un chanoine, puis d'un médecin, avant de rejoindre Madrid, où l'attendront d'autres aventures… …  

Tout l'intérêt du Gil Blas de 1715 (livres I à VI) réside dans la peinture, alerte et parodique, d'un anti-héros : relatant les premières déconvenues du personnage, il met en scène un jeune homme crédule, qui ne tire aucune leçon de ses expériences malheureuses – dans les livres suivants (1724-1735), Lesage retombera dans un schéma plus classique, en donnant à lire la grandeur et la décadence d'un valet ambitieux.